Dans son roman intitulé « Quarante ans dans l’attente d’Isabelle », publié en 2016 par la maison d’édition Manchourat Difaf, et celle d’Al-Ikhtilâf, Sa’îd Khatiby prends pour point de départ la biographie de l’écrivaine et globe-trotteuse suisse Isabelle Eberhardt (1877-1904) et termine son livre avec elle. Entre ces deux points se ramifient les évènements et les personnages entremêlant le passé et le présent.

Dès le début, nous constatons un lien étroit entre Isabelle Eberhardt et Josef Rinchard, protagoniste qui découvrit un manuscrit d’Isabelle quarante ans après sa mort tragique. Il le trouva au foyer d’un ex-employé de la municipalité de la ville de Bou Saâdâ dans le sud de l’Algérie, où elle a séjourné par intermittence. Dans ce manuscrit, elle révèle une partie sombre de son quotidien bruyant.

Le protagoniste / narrateur, qui fut artiste et soldat ayant participé à la Seconde Guerre mondiale, puis à la révolution algérienne contre l’occupation française, imagine une seconde vie de l’écrivaine et la globe-trotteuse suisse. Elle l’évoque de son tombeau désertique et la déplace à l’époque contemporaine. Son spectre à elle l’accompagne jusqu’en 1992, l’année qui préceda l’entrée de l’Algérie dans la décennie noire. A se sujet, le roman pose une des questions les plus critiques tout en essayant d’y répondre : Comment l’Algérie est-elle arrivée à ce point de la violence sanglante lors des années quatre-vingt-dix ?

La relecture des travaux d’Eberhardt — son journal et ses récits — dévoile qu’un détail a été omis dans sa biographie. Ses textes qui nous sont parvenus sont démantelés. Ses manuscrits les plus importants, qu’elle a écrits pendant la dernière partie de sa vie, furent repêchés des décombres des inondations d’oued ain -Safrâ’, dans le sud-est de l’Algérie, à proximité du Maroc, inondations qui entraînèrent sa mort. Ceci poussa les chercheurs à essayer de remettre en ordre ses manuscrits et à les restaurer car certains d’entre eux furent affectés par les inondations.